Comment la gratitude peut changer notre vie

N’avons-nous pas tous déjà utilisé ces réponses machinales le lundi matin à la machine à café ? Cela ferait tâche de répondre avec ce qui habite réellement notre cœur… L’injonction au bonheur Dans ce cœur s’y cachent des soucis de travail, des pépins de santé, des difficultés familiales, des peurs de mal faire, des moments de déprime et des coups de fatigue… Mais à la question « ça va ? » on répond presque invariablement « oui». Fausse pudeur ? Timidité ? Envie de préserver notre intimité ? Ou, insidieusement ancrée au fond de nous, serait-ce cette injonction sociale de tout positiver, de garder la face, de faire bonne figure ? Une sorte d’endoctrinement, de nouveau code culturel qui imposerait de tout lisser d’un sourire impeccable mais qui sonne faux. Celui qui répondrait “Non, ça ne va pas si bien en ce moment” risque de passer pour le trouble-fête en brisant le contrat social d’une tranquillité imposée. → Et vous, “ça va ?” Résultat des courses : nous affichons en permanence le visage souriant de celui qui vit tranquillement, qui fait les choses bien, qui est à l’heure, ne se pose pas trop de questions, réussit dans son travail, a beaucoup d’amis, mange équilibré… Mais c’est pourtant également le visage de celui qui pleure seul le soir, de celui à qui on vient d’annoncer une maladie, qui se sent seul au monde, que sa femme vient de quitter. Mais “il faut rester optimiste”, voir le bon côté des choses, se rappeler qu’il y en a qui sont plus à plaindre, être un battant car peu d’oreilles seraient capables d’entendre son angoisse. Alors oui, “ça va”. “Ça va”… Jusqu’à l’épuisement ou l’éclatement intérieur. “Mais le bonheur est déjà là !” affirme Martin Steffens, ce n’est pas à nous de le fabriquer !Il suffirait donc d’ouvrir les yeux et d’apprendre à le trouver ? Une nouvelle manière de regarder sa vie Pour Martin Steffens, l’être heureux est celui qui choisit sa vie sans la subir. L’indice qui montre que la vie a triomphé, c’est la joie. Et le travail de la joie, c’est la gratitude, ce profond mouvement de remerciement de notre cœur à l’invisible. Un coeur qui consent à recevoir la vie et le bonheur comme un cadeau pour devenir « réceptacle de sa lumière ». Qu’est ce que la gratitude ? D’après de nombreuses études, la gratitude produit un feu d’artifice de bienfaits tout à fait spectaculaires ! → Les bienfaits sur le corps : diminution du stress et amélioration du sommeil → Les bienfaits sur le psychisme et le mental : augmentation des sentiments agréables comme la joie et l’amour ; diminution des sentiments désagréables comme l’anxiété, le désespoir ou la tristesse ; fortification de la volonté et de l’amour de soi → Les bienfaits relationnels : relation aux autres pacifiée et bienveillante (car la gratitude fait régner un climat de paix et de joie qui facilite la communication) → Les bienfaits spirituels : mouvement de reconnaissance pour tous les dons que la vie nous offre. Tentant, non ? Ne rêvons-nous pas tous de connaître un état intérieur stable et joyeux malgré les difficultés et les épreuves de la vie ? Mais alors, comment faire ? Mettre en place la gratitude au quotidien La gratitude s’apprend. Elle est le fruit d’un entraînement qui fait appel à notre intelligence, notre cœur et notre volonté. Qui dit entraînement dit répétition, car c’est la répétition qui crée la transformation de notre état intérieur. Alice et Vincent Drisch, invités il y a quelques semaines sur le plateau des Lueurs, parlent d’exercices de gratitude pratiqués au quotidien avec leur fils Isaac, porteur de trisomie 21. Il y a trois étapes dans un exercice de gratitude : La répétition quotidienne de ces trois étapes va augmenter mon acuité à remarquer les bienfaits dont je suis comblé gratuitement. Cela aura pour effet de multiplier les émotions positives qui toucheront mon coeur et me poussera à remercier incessamment la vie ! Une vraie musculation de la gratitude ! Ainsi, peu à peu, la vertu de gratitude s’installe dans ma vie, elle devient une attitude habituelle. Ce qui signifie que, lorsque je vis des moments d’épreuve, je suis capable d’accueillir l’émotion qui m’envahit puis de la laisser partir en convoquant la gratitude… Même pour cette douleur-là ! Si l’exercice de remercier le Ciel pour les frustrations et les épreuves que je vis paraît contre-intuitif, c’est ce que la gratitude nous enseigne : “J’accueille et j’accepte de ne pas tout comprendre, de ne pas avoir la vision d’ensemble et donc de buter contre ce mur qui m’est imposé, que je n’ai pas choisi. Je suis sûr que cet obstacle me transformera et que quelque chose de bon en sortira. Alors je remercie, quoi qu’il arrive !” La gratitude me permet ainsi de conserver un état intérieur stable, de prendre du recul par rapport à la situation et de remercier la vie ou Dieu pour les fruits que cette épreuve portera, même si je ne suis pas encore capable de les voir. C’est directement à la confiance qu’elle nous conduit. Le témoignage d’Alice et Vincent Drisch Le témoignage d’Alice et Vincent au micro des Lueurs est profondément révélateur des bienfaits de la gratitude. Anéantis, en colère et désemparés à la naissance de leur fils Isaac lorsqu’ils découvrent sa trisomie 21, le couple crie sa colère et son angoisse à Dieu dans une prière commune. C’est à ce moment précis, en ouvrant les yeux pour regarder son fils, que Vincent s’aperçoit du sourire qui est accroché au visage du nourrisson. Pour lui, c’est une réponse directe et immédiate de Dieu, car le prénom Isaac signifie “le sourire de Dieu”. Naît alors en Vincent et Alice un amour inconditionnel pour leur fils. Comme si Dieu leur avait fait une promesse : celle d’une vie remplie de joie – avec Isaac mais surtout grâce à Isaac. Depuis, le couple s’exerce à pratiquer la gratitude quotidiennement. Alice l’explique ainsi : “Moi, je suis beaucoup dans le contrôle, dans l’organisation, dans la projection. Isaac
Réapprendre à s’émerveiller

“Le plus grand miracle de la vie est qu’elle soit vécue”. N’en déplaise à Dostoïevski vous auriez raison d’interroger cette déclaration et de vous demander… Mais qu’y a-t-il de si miraculeux à vivre ? Chaque jour qui se lève est un miracle Au fond, c’est un réflexe courant de se lever le matin avec la journée devant soi, de consulter son agenda, de mettre en ordre ses petites obligations et ses grands désirs. Mais d’un autre côté, nous savons paradoxalement que nous devons nous libérer de ces injonctions multiples et enfermantes qui occupent notre quotidien. Car vouloir programmer ses vacances, ses loisirs et ses rencontres ; avoir une vie sociale satisfaisante, une vie professionnelle épanouissante et une vie de famille joyeuse est un défi de taille qui nous plonge régulièrement dans les méandres de l’angoisse. Si la vie est “censée” nous offrir tout cela, si nous attendons ces cadeaux comme des dus, alors nous passons à côté du miracle mais aussi du mystère qui enveloppent toute la question de notre existence. L’homme moderne dont la vie est parfaitement maîtrisée, celui qui est habitué à utiliser sa force propre pour avancer, qui pense que la vie va de soi, oublie la chose la plus importante mais la plus cachée : sa propre finitude, sa propre vulnérabilité. Une ouverture à la fêlure C’est la connaissance de notre fragilité la plus intime qui nous entraîne au-delà de cette routine maîtrisée et rassurante. En ouvrant l’œil, nous découvrons une infinité de manières de découvrir notre vulnérabilité. Nombreux sont les invités des Lueurs qui permettent en nous cet ouverture à la fêlure. Guillaume Cail, dans l’interview donnée aux Lueurs avec sa femme Marie-Caroline, se confie : « Comment ai-je pu passer toutes ces années à considérer que c’était normal d’être en vie, d’avoir des enfants et une femme qui m’aimaient…? À ce moment-là, j’aurais donné tout l’argent que je n’avais pas pour acheter une minute de cette vie normale. » Stéphane Houdet, un autre invité aujourd’hui champion paralympique de tennis après avoir perdu sa jambe dans un accident de moto, explique : « Quand tu as 25 ans et que tu as tout réussi, tu te crois invincible. Mais après l’accident, j’ai compris que nous étions vraiment mortels et mortels tout de suite, quel que soit notre âge. Sur le plan de la sagesse, il est indispensable de comprendre ça pour continuer à vivre.». Et d’ajouter : « Quand je sors de ma chambre d’hôpital pour la première fois après 6 mois, je sens l’odeur du bois, et je trouve ça fabuleux ! » → Lequel d’entre nous goûte-t-il encore aux cadeaux de la nature comme l’odeur particulière d’un arbre, le chant des oiseaux, le goût d’un plat fait maison ? → Lequel d’entre nous est-il attentif aux attentions que nous portent nos proches, aux services qui nous sont rendus gratuitement ? → Lequel d’entre-nous s’émerveille-t-il de ce que la vie lui a fait comme cadeau ? Ses enfants, sa santé, ses amis, ses qualités… → Qui remercier ? Quand remercier pour cette vie en abondance que nous avons reçue depuis toujours, gratuitement ? La vie en abondance Oui, nous sommes des êtres de paradoxes, nous qui avons besoin du manque, du drame, de l’accident pour valoriser ce qui est et ce qui est bon. Car le plus souvent, nous avons besoin de côtoyer la mort pour valoriser la vie, de connaître la solitude pour valoriser le contact humain, d’approcher la maladie pour reconnaître que la santé est une chance. « L’homme chérit le plus la vie au moment où il sait qu’il va la perdre, se rendant compte a posteriori que son existence toute entière fut une série de miracles dont il ne prit pas totalement conscience » Nathalie Ohana C’est en écoutant l’interview de Clémence Pasquier que nous pouvons réellement prendre conscience de l’immensité du miracle qu’est la vie. Atteinte d’un cancer généralisé à 29 ans, les médecins lui ont annoncé que son espérance de vie se comptait aujourd’hui plus en mois qu’en années. Grâce à Clémence, nous pouvons alors, sans attendre, reconnaître que respirer, être debout ou s’animer est un miracle, que ceux qui nous entourent sont eux-mêmes des miracles, que l’environnement qui nous entoure est un miracle. Grâce à elle, nous pouvons alors décider d’en être éternellement reconnaissants. Par choix, reconnaissons que l’instant nous est offert, alors autant décider de l’accueillir comme un cadeau. Un choix pour la joie à l’image des moines et moniales dans leurs monastères qui débutent leur prière de l’aube par cette phrase : « Seigneur, ouvre mes lèvres, et ma bouche publiera ta louange » Ps 51 Dès le lever du soleil, ils témoignent ainsi de leur gratitude pour cette journée qui commence, la création qui les entoure, la vie qui les habite. Emplis de cette reconnaissance, ils posent sur le monde un regard qui contribue à le rendre beau, bon, généreux… miraculeux ! Pour aller plus loin : FAMILLE XXL, UNE VIE EN MODE SURVIE ? Avec Marie-Caroline & Guillaume Cail J’AI PERDU MA JAMBE, J’AI GAGNÉ MA VIE (et Roland-Garros), avec Stéphane Houdet J’AI 29 ANS ET JE ME PRÉPARE À MOURIR. Vivre au présent, avec Clémence Pasquier